Monsieur Blanc ouvrit la porte de communication entre son bureau et le secrétariat puis s’effaça pour laisser sortir le policier.
– Madame Golliet, vous donnerez à l’inspecteur les dossiers dont il aura besoin.
– Bien monsieur.
– Excusez-moi, je vous laisse, j’ai un coup de téléphone urgent à donner, dit le principal en refermant soigneusement la porte de son bureau.
Pricaz eut un petit sourire à l’intention de la secrétaire qui haussa imperceptiblement les épaules. Elle ouvrit un tiroir de sa table de travail, en sortit un trousseau de clés et se tourna vers une lourde armoire métallique qui tenait presque du coffre-fort.
– Les dossiers sont classés par ordre alphabétique, sans distinction de profession. Vous pouvez vous installer là ! fit-elle en désignant une autre table placée en vis à vis de la sienne.
– Merci. Pouvez-vous faire convoquer quelques élèves ? Monsieur le Principal est au courant, bien entendu !
– Donnez-moi les noms, j’appelle un surveillant.
– Toujours les mêmes : Santo, Chapelle et Meyer de troisième D.
– Ils vous attendrons dans la salle des réunions.
Pricaz se dirigea vers l’armoire ouverte. Tête inclinée sur l’épaule gauche, il lut les noms inscrits sur les dossiers suspendus et décrocha celui de monsieur Lemercier.
C’est avec intérêt que l’inspecteur apprit que le concierge avait fait l’objet d’une mutation disciplinaire à la suite d’une plainte. Auguste Lemercier avait été accusé d’avoir frappé un élève et les autorités administratives avaient décidé de lui infliger un blâme et de le déplacer de Chambéry à Annecy.
Yannick, David et Felipe étaient bien inquiets en pénétrant dans la salle du conseil. Ils jetèrent un regard torve et plein de haine à Véronique Dunand qui les planta là et partit sans refermer la porte.
Felipe, silencieusement alla jeter un coup d’oeil dans le couloir : personne !
– Qu’est-ce qu’ils nous veulent encore ? demanda-t-il, sans d’ailleurs espérer de réponse satisfaisante.
– Ils ont sûrement tout trouvé dans le grenier, mais on ne craint rien, c’est le Guste qui va prendre ! répondit tout de même Yannick.
– Ou alors c’est la pionne qui s’est plaint à cause de sa bagnole... imagina David.
– Pas possible ! Elle sait bien qu’on était en classe à ce moment-là ! rétorqua Felipe.
– Si un jour mon pater apprend tout ça, je vais recevoir bon ! David était visiblement le plus anxieux des trois copains.
– Personne peut rien prouver. Il suffit d’dire qu’on comprend pas, qu’c’est pas nous, qu’on est innocent, qu’on n’a jamais rien fait. Même s’ils nous croient pas, ils sont coincés !
Tout en parlant, Felipe jeta un nouveau coup d’œil dans le couloir et recula rapidement :
– Merde, c’est pas l’dir, c’est encore le flic, tenez bon les mecs !
Pricaz s’avança jusqu’à l’entrée de la pièce et s’immobilisa, mains dans les poches de son anorak, sans un mot. Il regarda les trois jeunes, l’air glacé, les traits figés, puis son regard alla lentement de l’un à l’autre, systématiquement, inquisiteur. Yannick et Felipe soutinrent son regard. Seul David céda et baissa les yeux.
Le silence durait, gênant, lourd, presque consistant. Felipe, mal à l’aise, lança :
– Qu’est-ce qu’on a encore fait ? Pouvez pas nous laisser bosser !
L’inspecteur n’eut même pas le sourire méprisant que méritait cette assertion. Il dévisagea froidement Felipe puis s’adressa à Yannick.
– Vous deux, vous allez au secrétariat et vous attendez que je vous appelle.
– Mais...
La voix de l’inspecteur claqua :
– Tout de suite !
Les deux adolescents soufflèrent et sortirent en traînant les pieds, sans fermer la porte.
David Meyer, très pâle, attendait avec anxiété. L’inspecteur se retourna lentement, posément, en professionnel du conditionnement psychologique. Il laissa encore passer quelques secondes qui parurent interminables au jeune David, puis s’assit sur le coin d’une table, dos à la fenêtre.
– Toi, c’est David Meyer...
– Oui, mais...
– Tu commences par fermer la porte, ensuite tu écoutes bien ce que je vais te demander et enfin tu réponds, vu ?
– Oui monsieur.
– David, je vais te poser quelques questions. Les réponses, je les connais déjà, c’est un simple test de sincérité. La seule chance qui te reste d’éviter les ennuis, c’est de me dire la vérité, et cette chance, c’est la dernière, compris ?
– Oui monsieur.
– David, tu es sorti de l’étude lundi dernier et tu es resté absent plus d’une demi-heure. Où es-tu allé ?
– ...
– Je vais te rafraîchir la mémoire, tu es allé retrouver ton copain Vincent Lebrun ! Pourquoi ?
– Pour... fumer une cigarette dans les WC.
– Alors, pourquoi as-tu dit que tu étais allé à l’infirmerie te faire soigner ?
– Je suis allé aux WC après.
– Retrouver Vincent ?
– Ben... oui quoi.
– Et vous êtes restés aux toilettes ?
– O... oui.
– Et ensuite, qu’avez-vous fait ?
– On a fumé une cigarette, je viens de vous dire !
– Qui on ?
– Vincent, Felipe et Yannick.
– Ça c’est vrai, vous étiez tous les quatre, mais vous n’étiez pas aux toilettes ! David, tu viens de perdre ta seule chance d’échapper aux ennuis, tant pis pour toi...
L’inspecteur se leva et fit mine de se diriger vers la porte. David eut l’impression qu’un voile obscur s’étendait devant ses yeux et qu’une main gigantesque serrait ses tempes. Incapable de réfléchir, incapable de raisonner, il n’eut plus qu’une envie, en finir avec toutes ces questions, oublier ce cauchemar, redevenir comme avant, quand tout le monde était content de lui. Il craqua.
– Non, non, attendez, je vais vous dire, on était dans le grenier.
– Tu as raison de dire la vérité, David. Que faisiez-vous dans le grenier ?
– On se réunissait pour fumer.
– Seulement pour fumer ?
– On buvait un peu aussi.
– Quoi par exemple ?
– Ben du coca et aussi un peu de gnôle.
– Et c’est tout ?
– Heu n...on, on avait des revues...
– Quel genre de revues ?
– Des revues avec des femmes...
– De l’alcool, des bouquins pornos, des cigarettes, tu es sûr que tu n’oublies rien ?
– Heu... non...
– David, je sais que vous fumiez, et pas seulement du tabac, alors ?
– C’est pas moi qui l’achetais, je vous jure !
– Qui achetait quoi ? parle !
– Ben... le sheet quoi !
– Et qui l’achetait ce sheet comme tu dis ?
La voix déjà étranglée de David se fit imperceptible et le policier n’eut la confirmation attendue qu’en suivant le mouvement des lèvres de l’adolescent.
– Felipe.
Anéanti, les poings fermés appuyés contre le front, le dos voûté, écrasé par le poids de ses révélations, David se mit à pleurer. L’inspecteur, mal à l’aise se releva et, de la main, souleva le menton du jeune garçon.
– Une dernière question David, qui a poussé Vincent dans l’escalier ?
– Ce n’est pas nous, ce n’est pas nous, je vous le jure, Vincent était notre copain, on n’aurait jamais fait ça, il faut me croire, il faut me croire !
La voix de David montait dans les aigus à mesure que ses nerfs lâchaient : la crise de nerfs était toute proche. Pricaz jugea que c’était le moment de faire un peu machine arrière. Il mit le bras sur les épaules de l’adolescent désemparé et murmura d’une voix plus douce, presque tendre :
– Je te crois, David, vous n’avez pas poussé Vincent dans l’escalier ; mais il faut que tu me dises avec le plus de précision possible tout ce que vous avez fait lundi dernier à partir de trois heures. Allez, raconte, Vincent est sorti le premier ?
– Oui, il est sorti vers trois heures quinze, moi je l’ai suivi quelques minutes après et je l’ai rejoint dans le bas de l’escalier du bâtiment principal. Yannick est arrivé après avec Felipe. Alors on est monté au grenier.
– Vous avez une clé ?
– Vincent avait une clé d’armoire limée qui ouvrait la porte d’accès, comme un passe quoi !
– Et il était seul à avoir ce genre de clé ?
– N...non, j’en avais une aussi...
– Tu l’as sur toi ?
– Non, elle est cachée derrière les préfas.
– Continue, vous êtes montés au grenier et là, qu’avez-vous fait ?
– On a bu un peu de whisky chacun et on a sorti les... revues.
– Vous avez fumé aussi !
– Oui, Felipe avait un paquet d’Amsterdamer et une barrette.
– Explique toi mieux.
– Et bien on effrite la barrette de “H“ au dessus d’une assiette en la frottant dans les mains et on mélange avec du tabac à rouler. C’est Yannick qui réussi le mieux à rouler les joints.
– Vous avez tous fumé ?
– Non, Vincent n’y a pas goûté cette fois là, il a seulement regardé les bouquins. Yannick en avait dégotté des nouveaux.
– Yannick les achète ces revues ?
– Euh... non...
– Tu es sûr que Vincent n’y a pas touché, à votre poison ?
– C’est vraiment du poison ?... Oui, je suis sûr qu’il n’a pas fumé, il regardait seulement les revues. Même que Felipe lui a demandé quand est-ce qu’il se payait la Géraldine !
– Qu’est-ce qu’il a répondu ?
– Que Géraldine le faisait chier, qu’il n’y avait rien à en tirer, qu’elle voulait jamais et qu’il allait bientôt se faire une vraie femme.
– Sais-tu de qui il voulait parler ?
– Non. Felipe lui a demandé mais il n’a pas voulu le dire.
– C’est tout ce que vous avez fait ?
– On est descendu juste avant la récré de quatre heures, comme d’habitude.
– Et après la récréation ?
– On est allé en physique. On était tous très excités, alors la Duparc nous a collé une interro écrite.
– Et après l’heure de physique ?
– Moi, je suis rentré à la maison.
– Tes copains, qu’ont-ils fait ?
– J’ai vu Vincent qui discutait avec Géraldine; Yannick et Felipe sont sortis en même temps que moi.
– Après, tu es rentré directement chez toi ?
– Oui. Vous ne direz rien à mes parents n’est-ce pas ? Mon père me tuerait !
– Écoute David, vous avez fait des conneries, tu t’en rends compte ? Tu sais que l’usage de la drogue est un délit, sans parler des conséquences que pourrait avoir l’introduction d’alcool et de revues pornos dans un établissement scolaire ! Mais comme tu as été franc avec moi, je vais essayer d’écraser le coup. Tu vas rentrer bien sagement chez tes parents et te mettre à ton travail, d’accord ?
– Oui monsieur.
– Allez, va !
David, un peu rasséréné, ouvrit la porte et, après une légère hésitation, prit le couloir dans la direction opposée à celle du secrétariat. Pricaz passa une main dans ses cheveux avant de se masser longuement l’occiput. Une partie de l’affaire était élucidée : les réunions clandestines, l’alcool, les revues cochonnes et même la drogue, tout trouvait une place dans la logique des faits et le comportement des jeunes, mais il manquait un élément, une pièce du puzzle ne s’intégrait pas à l’ensemble. Pourquoi Vincent s’était-il comporté différemment des autres ce jour là ? Comment expliquer cette attitude inhabituelle ?
Pricaz sortit à son tour, se dirigea vers le secrétariat en se recomposant un masque tragique. Il ouvrit la porte : les deux élèves qui se tenaient debout près de la fenêtre pivotèrent vers lui et madame Golliet leva un œil interrogateur. L’inspecteur tendit l’index vers Yannick Chapelle.
– À ton tour !
Yannick déglutit nerveusement et s’avança vers le policier qui tourna les talons pour se diriger vers la salle de réunions. Une fois la porte refermée, Pricaz attaqua, sûr de lui.
– Yannick, je sais tout. Le grenier, le whisky, les livres, les cigarettes et la résine, je sais tout ! Si tu veux éviter les graves ennuis qui t’attendent, tu n’as qu’une chose à faire : répondre aux questions avec le maximum de détails et de précisions. Qui vous fournissait la drogue ?
Yannick, de pâle qu’il était, devint blême. Ses mains furent prises d’un tremblement incontrôlable.
– C’est Felipe qui l’achetait.
– À qui ?
– À son frère je crois.
– Avec quel argent ?
– On se débrouillait pour en avoir.
– Tout ! Tu dis tout ! Et en détail ! Comment vous procuriez-vous l’argent nécessaire ?
– On a notre argent de poche.
– Yannick, arrête de me prendre pour un idiot, je connais le prix du cognac et du whisky, les revues ne sont pas données et quant au sheet comme vous dites, la barrette se négocie à cent francs au moins ! Alors, raconte !
– Ben... les revues, on les taxait en achetant autre chose...
– Je te parle de l’argent nécessaire à l’achat des barrettes ! Ça, tu ne pouvais pas le taxer comme tu dis si bien !
– On avait des trucs, l’argent des commissions...
– Tu te fous de moi ? Tu veux qu’on aille au commissariat pour un interrogatoire, officiel celui-là ?
– Non, je vais vous dire, on piquait des ballons.
– Comment ça ?
– Quand on avait gym, on s’arrangeait pour planquer un ballon dans la tribune du gymnase ou dans une haie du terrain de sport et on le récupérait après. Ça se revend cinquante balles.
– Votre professeur, monsieur heu... Lathuille ne s’en apercevait pas ?
– Des fois, il comptait, alors on faisait semblant de chercher pour le récupérer mais souvent on était pressé de prendre le car, alors ça marchait.
– Cinquante francs, ça ne suffit pas !
– Il y a aussi la vente des calendriers.
– Explique.
– Souvent, on nous demande de vendre des calendriers, pour l’association sportive par exemple, alors on double le prix et on garde la différence.
– Bravo ! Et puis encore ?
– Quand on avait lu les revues, on les revendait à des mecs des autres classes ; il y a beaucoup de demande.
– N’avez-vous pas volé dans les vestiaires de gymnastique ?
– Moi non ! Je vous assure que je n’ai jamais volé un copain ; une revue de temps en temps dans un magasin, ou un quarante-cinq tours, je ne dis pas, mais de l’argent, jamais !
– Vous avez fumé lundi dernier ?
– Juste un joint pour trois.
– Comment pour trois ? Vous étiez quatre dans le grenier !
– Oui, mais Vincent n’en a pas voulu. Il a juste regardé les derniers bouquins. Il pensait plus aux filles qu’à autre chose.
– Il avait sa copine Géraldine, non ?
– Oh, celle-là, quel pot de colle ! Vincent l’aimait bien mais il nous disait qu’il n’y avait rien à en tirer. Une petite bise de temps en temps, c’est gentil, mais ça ne lui suffisait plus à Vincent.
– Il voulait la lâcher, c’est ça ?
– Oh non, mais il voulait autre chose en plus.
– Je vois. Et après l’heure de physique, qu’est-ce que tu as fait ?
– Je suis sorti avec Felipe. On s’est dit au revoir devant la grille. Il est parti avec son frangin.
– Vincent n’est pas sorti avec vous ?
– Non, il discutait dans la cour, avec Géraldine justement !
– Ton histoire de certificat de scolarité, c’était du bidon ?
– Non, je vous jure, je suis vraiment allé au secrétariat !
– Bon, Yannick, tu as assez fait de conneries comme ça, alors tu vas rentrer chez toi et...
– Chez qui, mon père ou ma mère ?
– Ah ? d’accord, divorcés hein ?
– Oui.
– Yannick, rentre et fais-toi oublier. Je vais voir ce que je peux faire. Le mieux serait que tu te mettes sérieusement à bosser, tu ne penses pas ?
– De toute façon, mes vieux, ils s’en foutent de moi, alors...
– Ce n’est pas une raison pour gâcher ta vie !
Pour l’instant, je peux peut-être rattraper tes bêtises, seulement tu me donnes ta parole de ne pas recommencer.
– On peut peut-être essayer !
– Tu peux aussi essayer de serrer la main d’un flic si tu veux, fit l’inspecteur en tendant le bras vers l’adolescent.
Yannick regarda Pricaz dans les yeux et lentement, leva la main vers celle du policier. Au fond de son coeur maltraité par la vie, quelque chose avait remué doucement. Il tourna vite les talons avant que son émotion devienne trop visible.
Felipe Santo, appuyé contre un radiateur, regardait dans la cour par la fenêtre du secrétariat. Quelques pigeons se disputaient les miettes des petits pains au chocolat que les élèves avaient vendu à la récréation pour alimenter la caisse du foyer.
Felipe savait bien au fond de lui que ses copains ne résisteraient pas longtemps aux questions insidieuses du policier. Il cherchait désespérément le moyen de s’en tirer sans laisser trop de plumes dans l’affaire.
Lorsqu’il entendit les pas de l’inspecteur, il se dirigea de lui-même vers la salle de réunion. Pricaz ne prit pas la peine de le conditionner, il attaqua d’emblée.
– Felipe, je ne te demande pas ce que vous faisiez dans le grenier avec l’alcool, les revues cochonnes, le tabac, le « chocolat », tout ça, je le sais ! Je vais simplement te poser deux questions ; si tu réponds la vérité, j’essaie de te tirer d’affaire, sinon, c’est le tribunal pour enfant, compris ?
Assommé d’entrée, Felipe sentit son esprit s’obscurcir et ses idées lui échapper.
– Ouais, fit-il avec une mine de chien battu.
– Qui fournit la drogue à ton frère ?
– Hein ?
– Ne me fais pas répéter, ne gâche pas ta chance, c’est la dernière !
– C’est... Féfé.
– Fernand Almeida ?
– Ouais !
– Il se la procure où ?
– À un de ses potes qui vient de Grenoble, mais j’sais pas son nom.
– Deuxième question, qui a écrit cette lettre ? demanda Pricaz en sortant de sa poche d’anorak le mot dénonçant le concierge.
– C’est pas moi !
– Disons que tu étais d’accord alors.
– Ben ouais, c’te salaud d’Guste, y buvait not’ cognac et y fauchait nos bouquins !
– Comment le sais-tu ?
– J’l’ai vu !
– Quand ça ?
– Ben hier soir.
– Parce qu’hier soir tu étais dans le grenier ! Pourquoi faire ?
– On voulait tout planquer, mais on a vu c’t’espèce de salaud qui profitait d’nos affaires alors on a pensé à tout lui mettre sul’dos. Il est tout l’temps à nous emmerder, c’était bien fait pour sa gueule !
– Felipe, encore un mot, tu sais qui a poussé Vincent dans l’escalier ?
– Non, j’vous jure ! Vincent, c’était un pote et si j’y savais, j’vous y dirais !
Pricaz se frotta le cou et regarda attentivement son jeune interlocuteur.
– Oui, admettons. Lundi dernier, en physique, Vincent était à côté de toi, comment se comportait-il ?
– Mais il était pas à côté d’moi ! J’étais à côté de David qu’est meilleur en physique...
– T’es sûr ?
– Bien sûr que j’suis sûr !
– Vincent était à côté de qui alors ?
– Sylvain Villard.
Pricaz regarda Felipe droit dans les yeux, jaugeant l’adolescent. Après quelques secondes, il enchaîna :
– Felipe, tu vas rentrer chez toi et arrêter les conneries. Tu te calmes et j’écrase le coup ou tu continues et tu te retrouve en tôle, vu ?
– Ouais, d’ac !
– Qu’est-ce qu’ils font tes parents ?
– Mon père est sur un chantier et ma mère est à la maison.
– Vous êtes combien à la maison ?
– J’ai deux frères et trois soeurs.
– Oui... je vois... allez, file !