VALENTIN AU LYCÉE

36. Amitié

Rassurée de constater qu’Inge ne soit pas une rivale pour elle, Emily se rapprocha de la jolie danoise. Parfaitement anglophones toutes deux, il n’y avait pas entr’elles d’incompréhension due à une langue non maitrisée.
Questionnée par Emily sur son séjour dans les Landes avec Olivier mais surtout Valentin, Inge raconta tout : leur baignade qui faillit se transformer en drame à cause d’un courant de baïne, leur victoire dans un tournoi de volley-ball, le respect de Valentin lors de ses moments de naturisme, les batailles de Valentin pour la faire respecter, la parfaite amitié les unissant.
Elles prirent l’habitude de se rendre en ville par le car navette le samedi après-midi pour ensemble se promener sous les arcades de la vieille ville, contempler l’écrin des montagnes enserrant les eaux pures du lac, faire leurs petits achats, se prélasser sous le soleil de mai sur les pelouses du centre-ville.
Un soir, après le repas, alors que ses grands-parents s’étaient installés devant le téléviseur, Inge invita Valentin dans son studio embaumant l’ambre gris.
— Mais quelle est cette odeur ? demanda le garçon.
— Toi pas reconnaitre ? Mixelit, la plage !
— Oh si ! Mais cette odeur ici...
— J’ai petit flacon avec morceau du caillou qui sent bon. Moi l’ouvre de temps en temps pour rappeler bon souvenir.
— C’est aussi un excellent souvenir pour moi Inge. Qu’as-tu fait aujourd’hui ?
— Promenade dans belle ville et bords du lac avec Emily. Moi retourner toute seule prochain samedi pour acheter livres en français.
— Tu connais suffisamment la ville ?
— Plan dans téléphone.
— Ce n’est peut-être pas suffisant, la ville est grande. Accepterais-tu que je puisse te localiser sur mon smartphone de façon à pouvoir te guider si tu t’égares ?
— Faire comment ?
— Il suffit de placer une application dans nos deux appareils. Bien sûr je ne m’en servirai pas pour t’espionner, mais si tu m’appelles, je saurais où tu te trouves et pourrais te guider.
— Oui, j’ai confiance en toi. Tu peux faire.

Le samedi qui suivit, Inge prit seule le car navette pour le centre-ville.
À l’arrêt de Ville Semnoz, un jeune d’environ dix-sept ans monta dans le car et après un rapide coup d’œil vers l’arrière vint s’assoir près d’Inge. Il ne tarda pas à engager la conversation.
— Bonjour jolie jeune fille, je parie que vous êtes élève au lycée.
Avec sa politesse et sa gentillesse habituelle, elle répondit :
— Bonjour aussi. Oui, je suis. Aussi toi ?
— Exact. Tu as un léger accent british, Tu es d’origine anglaise ?
— Suis danoise. Mon nom est Inge.
— Inge, c’est charmant. Moi je suis de Ville Semnoz, donc Haut-Savoyard. Je m’appelle Luc. Tu es pressée ? Je peux t’offrir à boire ? Je connais un bar sympa dans les vieux quartiers.
— Possible pour moi. Avec plaisir.
— Tu connais bien la ville ?
— Pas bien encore, suis ici depuis un peu plus de un mois.
— Tu viens souvent en ville ?
— Samedi seulement pour petits achats.
Le car navette arrivé à son terminus hôtel de ville, le garçon entraina Inge dans les vieux quartiers en longeant une berge de la rivière évacuant le trop-plein des eaux du lac. Les bacs à fleurs suspendus aux rambardes du quai, les façades colorées des immeubles anciens, deux cygnes évoluant dans le petit déversoir, les arcades abritant commerces et premiers touristes, les petits ponts fleuris, le château dominant la ville, tout enchanta Inge.
Installés sur la terrasse ensoleillée d’un café, après avoir bu un soda avec le garçon, la jolie danoise ayant regardé l’heure sur son smartphone le remercia avec son charmant sourire et se leva.
— Tu t’en vas déjà ?
— Oui, je dois acheter un livre.
— On se reverra ?
— Je reviens en ville le samedi, des fois avec une amie, des fois comme aujourd’hui.

Le samedi suivant, dans le car-navette avec Emily et Valentin, Inge ne vit pas Luc qui pourtant guettait à l’abribus, mais ne monta pas. Arrivés en ville, les trois se dirigèrent vers les immenses pelouses de la ville en passant le long du canal du Vassé puis en empruntant le pont des Amours.
— Je vous offre un tour en pédalo, dit Valentin, heureux de la bonne entente entre les deux jolies blondes. Allons à ce ponton là-bas, celui avec les parasols bleus, ils sont sympas.
— C’est pour une heure de pédalo, nous sommes trois.
— Vous en voulez un avec tobogan, avec plage avant ou avec sièges en toile, dit le patron.
— Avec plage avant.
— Allez-y, embarquez. Vous pouvez aller où vous voulez dans la baie mais n’allez pas vers la petite ile à droite car après c’est le chenal des gros bateaux de promenade. Ces bateaux ont priorité sur toutes les autres embarcations sur le lac. On les reconnait à leur pavillon rouge à l’avant.
— Je vais vous laisser pédaler les filles, moi, je vais m’étendre à l’avant, me laisser promener et prendre de jolies photos. Cela vous dit ?
— Oh, oui, dirent ensemble les deux nouvelles amies.