Contraint de rester dans sa chambre par la pluie qui avait repris, Valentin s'était attelé à ses devoirs. Exercices de math rapidement résolus, il s'était plongé dans la lecture obligatoire d'un roman dont il devrait faire la présentation à la rentrée de janvier. Sur les conseils de son grand-père, il s'était décidé pour « Premier de cordée » de Roger Frison-Roche. Captivé par l'intrigue et les personnages, il avait dévoré d'un seul élan la moitié de son livre.
Estimant s'être assez avancé, il venait de poser l'ouvrage quand son téléphone vibra dans une poche contre sa cuisse. Un numéro en 06 qui lui sembla vaguement familier s'afficha sur l'écran. Bien que ce numéro ne figura pas dans son répertoire personnel, Valentin décida d'accepter l'appel.
— Allô Valentin ?
— Qui êtes-vous, que voulez-vous ? répondit-il froidement, bien décidé à ne pas se laisser importuner par un appel publicitaire indésiré.
— C'est Hugo.
— Ah oui, Hugo. Que se passe-t-il ?
— Est-ce que vous avez pu récupérer ce que vous vouliez ?
— Écoute Hugo, tu as fait ce que je désirais, tu m'as donné le renseignement que je voulais je ne t'en demande pas plus et comme je te l'ai dit, nous sommes quittes. Ah, j'ai annoncé à Camille que tu avais été correct, elle a trouvé que c'était bien.
— Tu crois qu'elle voudra ressortir avec moi ?
— Cela ne me regarde pas mais à ta place, je chercherais ailleurs. C'est aussi pour savoir ça que tu m'appelles ?
— Pas seulement. Je voulais te dire que Medy et Tintin sont furieux...
— De qui parles-tu ?
— Ahmed et Quentin, survêt gris et survêt noir. Ils se sont fait tabasser. Medy a un œil au beurre noir et Tintin les lèvres comme des saucisses.
— Je ne vais pas les plaindre, toi si ?
— Non, pas vraiment. J'aimerais juste savoir ce qui s'est passé et si c'est toi qui est à l'origine de tout ça.
— Attends Hugo, moins tu en sauras sur cette affaire, mieux cela sera pour toi. Sache seulement que cette fois tu es du bon côté de la barrière.
— Donc tu ne veux rien me dire ?
— Plus tard peut-être... Tiens toi loin de ces types car je pense qu'il va y avoir une enquête policière à leur sujet et sur leur entourage.
— Aïe, au sujet du shit ?
— Je vois que tu es au courant. Oui, à cause de ça mais pas seulement. Dis-moi, j'y pense comme ça, est-ce qu'il y a dans la cité des jeunes qui roulent dans des belles voitures, genre voitures de sport, quatre-quatre ou quelque chose d'approchant ?
— Dans la cité elle-même, non je ne vois pas, mais quelquefois et même assez souvent il vient une grosse BMW, une X3 avec un ou deux types à l'intérieur. Elle était là ce matin, pourquoi ?
— Est-ce que tu connais son numéro d'immatriculation ?
— Ben non, je ne retiens pas ces trucs là, j'ai juste remarqué le 38 en bout de plaque.
— 38, l'Isère, Grenoble... hum... Couleur de la voiture ?
— J'sais pas trop comment dire, comme du café avec du lait dedans.
— Beige marron donc.
— Oui, c'est ça. Ah aussi, elle a des vitres sombres.
— Quel âge ont les types à l'intérieur ?
— Ce sont des grands mais pas des vieux, je dirais entre vingt et vingt cinq ans.
— Si cette voiture revient dans ta cité, tu veux bien noter son numéro et me le dire ?
— Qu'est-ce que j'y gagne ?
— Une bonne remontée dans mon estime. Je peux aussi dire à Camille que tu regrettes ton attitude envers elle.
— Tu ferais ça ?
— Oui mais sans aucune garantie de résultat. Donc si tu vois cette voiture, tu m'envoies son numéro minéralogique en SMS.
— Franchement, ça m'embête un peu, je ne suis pas une balance !
— Non, tu es simplement un mec qui rend service, comme pour le téléphone de mon ami. Je te le redis en confidence, tiens toi à l'écart de tes potes Quentin et Ahmed. Ils sont très mal partis s'il y a une enquête policière, et il va y en avoir une.
— Ce ne sont pas mes potes, juste des connaissances qui de temps en temps me font tirer une bouif.
— De quoi parles-tu ?
— D'une fumette, d'un pétard quoi. Promets-moi que jamais ils ne sauront que les renseignements viennent de moi.
— Je te l'ai déjà promis, allez, salut.