VALENTIN AMOUREUX

20. ENQUÊTE PRIVÉE

Les vacances de Noël venaient de commencer, Valentin, à jour dans son travail scolaire, imaginait les activités qui allaient pouvoir occuper ses journées quand le texto laconique de Hugo arriva sur son téléphone : CD 831 PB 38. Immédiatement son esprit échafauda un plan d'enquête. Il regarda l'heure : dix-sept heures trente. « Bon, j'ai le temps d'appeler » soliloqua-t-il. Il composa le numéro privé de la gendarmerie du village que lui avait donné l'adjudant-chef Lemoine. Dès la seconde sonnerie la communication fut établie.
— Gendarmerie de Saint Thomas du Lac, j'écoute ?
— Brigadier Guimard ? demanda Valentin.
— Non, c'est c'est le brigadier Dufournet, qui êtes-vous, que voulez-vous, vous avez une déclaration à faire ?
— Pardon brigadier, c'est Valentin Valmont, je peux parler à votre collègue s'il vous plaît ?
— Ne quitte pas. « Guimard, c'est pour toi » hurla Dufournet, ce qui obligea Valentin à éloigner le téléphone de son oreille.
— Guimard, j'écoute !
— Bonjour brigadier, Valentin Valmont. Je ne vais pas vous déranger longtemps. Vous vous rappelez, l'adjudant-chef Lemoine m'a dit de faire appel à vous si j'avais besoin d'un renseignement.
— Parfaitement, que veux-tu savoir ?
— Juste le nom et l'adresse du propriétaire d'une voiture.
— Pourquoi veux-tu savoir ça ?
— Sans le faire exprès, une voiture a accroché la portière de la voiture des parents d'un de mes amis. Ils pensent que le conducteur ne s'en est même pas rendu compte. Ils ont relevé le numéro et s'ils peuvent connaître le nom et l'adresse du monsieur, ils préfèrent tout régler à l'amiable plutôt que de déposer une plainte. Vous pouvez facilement retrouver ça je crois.
— C'est quoi ton numéro ?
— C'est une plaque de l'Isère : CD 831 PB.
— Hum, pas bien réglementaire ça, mais puisque le chef est d'accord... Je te rappelle dans cinq minutes.
— Merci beaucoup monsieur le brigadier Guimard.

Valentin se mit à réfléchir. Il lui semblait que quelque chose ne collait pas dans cette affaire. Un jeune qui fréquente les cités et qui roule en BMW... Il en était là de sa réflexion quand son téléphone vibra :
— Guimard. Bon, voici ce que tu as demandé : cette plaque est celle d'une BMW X3 au nom d'un certain Daniel Ferrand. L'adresse déclarée est 17 rue Saint François à Grenoble. J'ajoute que cet homme est un fichu mauvais conducteur qui accumule les PV qu'il conteste à chaque fois d'ailleurs. Il n'a plus de points sur son permis. As-tu besoin d'autres renseignements ?
— Pas dans l'immédiat, merci beaucoup. Je dirai à monsieur Lemoine que vous avez été coopératif et très efficace.

Communication coupée, Valentin continua sa réflexion. Toujours cette chose qui ne collait pas. Un jeune qui n’a plus de points sur son permis et qui continue à rouler, une BMW X3… C'est une voiture plutôt chère pour un jeune qui fréquente les cités. Il secoua la tête, relança son smartphone et tapa dans son moteur de recherche « rue Saint François Grenoble » puis agrandit le plan obtenu. C'était une rue du centre-ville dans un quartier huppé. Valentin secoua la tête. Daniel Ferrand... Daniel... Hugo a parlé d'un jeune d'à peu près vingt-cinq ans. Est-ce qu'on donnait encore ce prénom désuet il y a une vingtaine d'année ? Cherchons.
Sur internet il trouva plusieurs sites répertoriant les prénoms les plus usités selon les années. C'était un prénom fort populaire dans les années quarante du siècle précédent mais complètement abandonné depuis trente ans. « Rien n'est logique dans tout cela, le mieux serait que je puisse me rendre à Grenoble pour tenter de rencontrer ce Daniel Ferrand mais comment faire pour y aller ? »
Pas question de solliciter ses grands-parents, il serait obligé d'expliquer les circonstances qui l'ont amené à se renseigner sur ce monsieur et puis il répugnait à leur mentir. Soudain une idée illumina son cerveau : « et si je demandais à l'adjudant-chef, il doit bien se rendre à Grenoble demain. Il va certainement exiger que mes grands-parents donnent leur accord mais comme ils ont confiance... Allez, je tente le coup ! »