VALENTIN ET SES COPAINS

8. SOUS L'ORAGE

Le car se gara sur un terre-plein caillouteux du hameau du Montoz dans un dernier chuintement de ses compresseurs. Madame Chevallier se leva :
— Attendez, restez assis, silence, restez assis. À cause du retard que nous avons pris, monsieur Doucet et moi avons dû modifier le programme de l'après-midi. Vous allez descendre, sortir vos sacs et vos duvets des soutes et vous regrouper dans cette grande tente que vous voyez à gauche et qui servira de salle de réunion ainsi que de salle à manger. Les chalets d'alpage sur votre droite ne vous sont pas accessibles, les alpagistes y fabriquent la tomme de Savoie, plus précisément la tome des Bauges. Vous visiterez demain. Pour l'heure, vous allez former des binômes de garçons et des binômes de filles, c'est à dire choisir votre compagnon de tente. Allez, vous pouvez sortir.
— On se met ensemble, Val ? questionna Gilles.
— Avec plaisir. Tu ne ronfles pas ?
— Je ne me suis jamais entendu ronfler.
— Ah, c'est malin ! Allons dans la tente de réunion.
— Waouh, qu'il fait chaud là-dessous. Je vais faire un malaise.
— Arrête, j'ai assez donné pour aujourd'hui et je n'ai pas envie de te faire du bouche à bouche.
— Tu demanderas à Océane de me le faire à ta place, je ne dirais pas non. Tu n'es pas jaloux ?
— Arrête avec ça. Océane n'est pas très intéressante. C'est une aguicheuse qui te laisse tomber à la première occasion. Regardons plutôt comment se sont formées les paires.
— Lucie s'est mise avec Eva bien sûr, Mathilde est avec Pauline et les jumelles sont ensemble, comme d'hab.
— Bouboule est avec Florian et Olive s'est mis avec Quentin. Qu'est-ce que tu penses de Quentin ?
— C'est un mec bien. Pas très bavard, un peu effacé mais il est loin d'être bête. Je crois qu'on peut compter sur lui.
— Nous pourrions l'intégrer à notre groupe, non ?
— Je suis absolument d'accord.

Madame Chevallier tapa dans ses mains pour attirer l'attention :
— Chaque binôme vient prendre une tente et deux matelas pneumatiques. Vous allez planter votre installation dans le carré de prairie délimité par un fil électrique derrière notre tente-chapiteau. Ce fil n'est pas là pour vous empêcher de sortir mais pour tenir les vaches à l'écart. Je mets en garde les garçons qui seraient tentés d'uriner par là... Ça vous fait sourire les filles ? Les toilettes se trouvent dans le plus petit des chalets, le plus près de nous. Des questions ?
— Madame, avec quoi on gonfle les matelas ? questionna Lucie.
— Il y a deux gonfleurs à pied dans cette caisse, sinon utilisez vos petits poumons ! Rassemblement ici dans trente minutes.

Madame Chevallier reprit la parole :
— Étant donné notre retard -il est maintenant six heures- comme le vous l'ai dit, nous avons modifié le programme de l'après-midi. Au lieu de l'excursion au col de l'ours qui demande plus de trois heures de marche, nous avons décidé de vous laisser quartier libre.
— Ouais ! cria Tony.
— Attention Tony, ça ne veut pas dire que vous pouvez faire n'importe quoi. Nous vous demandons de vous associer par deux avec, dans la mesure du possible, un appareil photo ou un smartphone par binôme et de vous promener en photographiant tout ce qui vous semble beau, intéressant ou inhabituel. Vous disposez d'une heure et demie. Avez-vous des questions ?
— M'dame, il est où File… euh monsieur Doucet ? demanda Clément.
— Dans un chalet, il s'occupe du repas qui aura lieu à huit heures ici même. Allez !
— Valentin, je peux m'associer avec toi ? demanda Pauline, mon téléphone est un vieux truc qui ne fait pas de belles photos.
Valentin sourit :
— Bien sûr, si Gilles avec qui je vais partager la tente est d'accord. Gilles, tu peux choisir un autre équipier ? Je m'associe avec Pauline pour les photos.
— OK Val, pas de problème, je me mets avec Lucie, Bouboule va avec Eva, Flo s'associe avec Mathilde. Olive reste avec Quentin.
— C'est réglé Pauline, où veux-tu aller ?
— Au hasard. Prenons ce chemin.
Un chemin « jeepable » bordé de prairies pâturées serpentait en montant dans le vallon, les deux adolescents adoptèrent un pas régulier et s'élevèrent dans la montagne. Ils passèrent devant deux granges, traversèrent un ruisseau à gué, pénétrèrent dans un bois clair. Valentin s'éloigna un peu du chemin, savourant la douceur du tapis de mousse sous ses pas. Un peu plus loin, il se pencha, cueillit un brin de muguet tardif en raison de l'altitude.
— Tiens, pour toi.
— Merci Valentin. Hum, quel adorable parfum !
— Oh, regarde Pauline cette fleur extraordinaire, je n'en ai encore jamais vues de telles ! Tu la connais ?
— Oui, je crois qu'il s'agit d'un Sabot de Vénus. C'est une orchidée de montagne, une fleur rare et protégée, on n'a pas le droit de la cueillir.
— Mais nous pouvons la photographier. Je fais un gros plan... là. Une au flash maintenant, voilà. Superbe !
— Tu ne trouves pas qu'il fait sombre et étouffant dans ce bois ?
— Tu as raison, continuons le chemin.
— Elle est réussie ta photo ?
— Oui, regarde, je l'ai doublée en plus.
— Magnifique ! Dis donc, on sort du bois mais il fait bien sombre quand même.
— Les nuages ! Tu as vu ces rochers énormes ! Ils ont dû faire du bruit quand ils se sont décrochés de la falaise.
— Mets-toi contre ce bloc, je vais te prendre en photo, file-moi ton appareil. Quelle masse ce rocher ! Tu es vraiment minuscule à côté.
— Merci Pauline.
Celle-ci se mit à rire :
— Je ne veux pas te vexer mais on ne peut pas rivaliser avec la nature. Imagine qu'il en tombe encore, qu'est-ce qu'on ferait ?
— Il n'y a pas une chance sur un milliard pour que cela se produise à cet instant et si malgré tout cela arrivait, il n'y a pas une malchance sur mille pour qu'il tombe sur nous. La probabilité est de un pour mille milliards, tu vois, nous pouvons marcher tranquille.
— Et si cela se produisait malgré tout ?
— Dans ce cas je mourrais en compagnie d’une des plus belles filles de la classe !
— Vil flatteur !
— À peine.
— Une bifurcation. On suit le vallon ou on va vers la falaise ?
— Allons vers la falaise, nous aurons plus belle vue.
— Tu ne penses pas que nous allons avoir un orage ? Il fait de plus en plus lourd et le ciel s'assombrit encore. Tu sais ce qu'il faut faire en cas d'orage ?
— Se mettre à l'abri si c'est possible.
— Et sinon ?
— Sinon on est mouillé !
— Très drôle !
— Mon grand-père m'a raconté des histoires d'orage en montagne. Il m'a dit que quand la foudre est sur le point de frapper, on perçoit comme un grésillement, comme un vrombissement d'insectes. Les montagnards appelle ça « entendre les abeilles ». Dans ce cas il faut très vite se débarrasser de tout objet pouvant attirer l'éclair comme les objets métalliques et se coucher au sol car la foudre frappe de préférence ce qui est vertical, un arbre, un homme debout, un clocher, une crête rocheuse.
— Tu ne crois pas qu'on devrait rentrer ? Ces énormes nuages ne me disent rien qui vaille.
— Mon grand-père dit aussi qu'un orage est quasiment toujours précédé d'une grande rafale de vent. Rien de tout cela pour l'instant. Viens, nous sommes presque arrivés à la falaise. Regarde-moi ce paysage en noir et blanc, je trouve cela un peu inquiétant mais magnifique. Je fais une photo panoramique.
— Valentin, je crois que le vent se lève.
— Tu es très chouette avec tes cheveux qui volent, je fais une autre photo.
— Valentin, viens, on rentre au camp.
Une soudaine bourrasque hurla dans les épicéas du petit bois, courba les buissons d'églantiers, secoua les arcosses, souleva quelques feuilles mortes du dernier automne. Elle fut suivie presque immédiatement par un éclair qui illumina le gris sombre des nuages. Trois secondes après, un coup de tonnerre éclata.
— Un kilomètre ! pensa tout haut Valentin.
— Qu'est-ce que tu dis ?
— La foudre a frappé à un kilomètre d'ici, à peu près au niveau du camp.
— Comment tu peux le savoir ?
— Le son met trois secondes pour faire un kilomètre, il suffit de compter.
— Tu es désespérant avec tes maths !
— Je ne dis pas cela pour rabaisser qui que ce soit ni à l'inverse pour me montrer supérieur. Si on ne parlait pas de ce que l'on sait, la conversation serait bien pauvre : ah, il va faire beau aujourd'hui, ah, nous allons avoir la pluie, ah il y a des cailloux sur le chemin… Et je ne fais pas de morale non plus, je donne mon avis, point.
— Ne te vexe pas, en fait j'étais plutôt admirative.
— À propos du temps, je crois que nous n'allons pas avoir celui de rentrer, il faut vite que nous trouvions un abri. Longeons la falaise en descendant, peut-être y aura-t-il un rocher surplombant pour nous abriter. Tu veux passer devant ?
— Non, toi.
— OK, fais attention en marchant, d'en bas j'ai repéré des zones d'éboulis, cela peut être instable. Le pire serait de se faire une entorse et d'être bloqué à découvert.
— Val, je viens de recevoir la première goutte !
— Pareil. Marchons un peu plus v...
Une boule de feu explosa comme un coup de canon sur un rocher vertical, juste en amont du petit bois, coupant la parole à Valentin. Immédiatement le ciel déversa sur eux des cataractes d'eau. Le bruit du vent, celui de la pluie et de l'écho du tonnerre conjugués atteignit un paroxysme.
— Val j'ai peur, qu'est-ce qu'on fait ? hurla Pauline.
— Continuons à longer la falaise, la crête nous protège de la foudre, cria Valentin.
— Je suis trempée, j'ai les habits qui collent à la peau.
— Oui, moi aussi. Ah, ouf, regarde, un grand trou dans la falaise, comme une grotte. Entrons dedans, mettons-nous à l'abri en attendant la fin de l'orage.
— Combien de temps à ton avis ?
— Je ne saurais pas te répondre avec exactitude. Entre une demi-heure et une journée.
— Ils vont s'inquiéter au camp.
— Je préfère qu'ils s'inquiètent plutôt que te voir foudroyée.
— Tu as raison. Dis donc, c'est plus profond que ça en a l'air. Il y a eu du feu là entre ces grosses pierres.
— Cette grotte sert probablement d'abri aux chasseurs à l'automne.
— Il y a une réserve de branches, du foin, des bouts de chiffons, des bouteilles vides, des vieilles boites de conserves... Valentin, j'ai un peu froid avec mes habits mouillés, tu crois qu'on pourrait faire du feu ?
— As-tu des allumettes ?
— Ben non.
— Moi non plus.
— Est-ce qu'on pourrait essayer de taper deux cailloux pour faire une étincelle et allumer les chiffons ?
— C'est de la roche calcaire, pas du silex, ça ne marchera pas. Laisse-moi réfléchir un instant.
Valentin resta quelques instants debout, immobile, le regard dans le vague puis il se décida. Fouillant dans une poche de son short, il sortit une ficelle et un opinel.
— Je ressors un instant, dit-il. Il ouvrit et bloqua à la virole son canif en position ouverte.
— Mais il pleut à seaux !
— Je ne serai pas plus mouillé que maintenant. J'attends le prochain coup de tonnerre et j'y vais.
— Pourquoi ça ?
— Parce qu'un éclair décharge temporairement l'atmosphère de son électricité, donc il y aura un temps mort avant le suivant, c'est du moins ce que dit mon grand-père.
— Qu'est-ce que tu veux faire ?
— Couper une branche de noisetier sauvage ou de ce que je trouverai.
— Pourquoi fai...
Un gigantesque éclair illumina jusqu'au fond de la grotte suivi immédiatement d'un énorme bang sonore et d'un redoublement de la pluie. Valentin ne prit pas le temps de répondre, il dévala l'éboulis jusqu'à un bosquet d'arcosses couchés par la neige du dernier hiver. Couper une branche lui prit deux minutes. Quand il eut rejoint la grotte, il dégoulinait de partout. Il décida de sauter sur place pour accélérer l'évacuation de l'eau, déclenchant le rire de Pauline.
— Tu as la danse de Saint Guy ?
Valentin s'arrêta, tendit son smartphone à son amie. Tu sais mettre le flash ?
— Pas bien, montre-moi.
— C'est facile, tu actives l'application « Appareil photo » puis tu touches le petit éclair blanc en haut à gauche.
— Qu'est-ce que tu veux que je fasse ?
— Tu vas réaliser un reportage unique en France. Prends une photo à chaque fois que tu le juges bon.
— Qu'est-ce que tu vas faire avec ton bâton mouillé, aller à la pêche ? se moqua Pauline en prenant la première photo.
Sans répondre, Valentin coupa l'extrémité la plus fine de la branche n'en gardant qu'un mètre, l’élagua de ses branchioles, l'écorça, fit une entaille circulaire à chaque bout. Il récupéra sa ficelle, l'attacha à chaque extrémité formant ainsi une sorte d'arc.
— Je me suis trompée, tu vas aller à la chasse ! se moqua son amie en prenant une nouvelle photo.
Valentin sourit. Il alla récupérer des bouts de bois brûlés de l'ancien feu, les disposa sur une lauze bien plate, s'accroupit et commença à les pilonner avec une pierre au champ aplati servant de marteau jusqu'à obtenir une fine poudre noire.
— Tu peux me dire ce que tu fais ? insista Pauline en flashant la scène.
— J'écrase du bois brûlé comme tu peux voir.
— Pourquoi faire ?
Toujours absorbé par son idée, Valentin ne répondit pas. Il se releva pour récupérer un bout de chiffon de coton qu'il lacéra en charpie avec son opinel.
Il retourna fouiller le bois accumulé dans un coin de la grotte et finit par extraire un bout de planche craquelée, desséchée, puis avisa un bâton également très sec du diamètre d'un manche à balai, bâton d'une trentaine de centimètres dont il arrondit les extrémités. Toujours à l'opinel, il creusa dans la planche une cavité circulaire du même diamètre que le bâton. Il entailla ensuite le milieu du bâton d'une encoche circulaire. Il rechercha enfin un autre bout de bois qu'il creusa également d'une alvéole d'un diamètre égal à celui du bâton.
Pauline continuait à prendre des photos.
— Tu peux m'expliquer ce que tu fais ?
— Je vais tenter de faire du feu à la méthode aborigène.
— Arborigène, c'est quoi ça ?
— Pas ARborigène mais Aborigène. Les aborigènes étaient les premiers habitants de l'Australie et ils ont heureusement toujours des descendants. Dans la ferme de mes parents travaille un couple d'aborigènes et j'étais bien copain avec leur fils. Il m'a montré comment ses ancêtres faisaient du feu. Je vais essayer de faire comme lui. Vas-y, continue ton reportage.
Valentin récupéra la poussière de charbon de bois écrasé, incorpora des fibres de tissu et plaça le mélange dans la cavité de sa planche.
— Le plus important maintenant, regarde bien :
Il fit faire un tour à la corde de son arc dans l'encoche du bâton dont il plaça l'extrémité la plus arrondie dans la poussière combustible, cala l'autre extrémité avec le petit bout de bois creusé.
— Avant de continuer, peux-tu me dire si l'orage se calme ?
Pauline n'eut pas la peine de répondre directement à la question, un autre très violent coup de tonnerre ébranla la falaise suivi d'une recrudescence de la pluie.
— Il fait presque nuit. Quelle heure peut-il être ? s'inquiéta Pauline.
— Appuie sur le bouton « home » du smartphone.
— Le bouton rond ?
— Yes mademoiselle.
— Dix neuf heures quinze !
— Est-ce qu'il y a du réseau ?
— Non, du tout, impossible de prévenir les profs !
— Alors continue ton reportage si tu veux bien, tu retouches l'icône Appareil photo pour relancer. En ce qui me concerne, le plus difficile de l'opération, c'est maintenant. Tenant l'extrémité de son arc comme l'archet d'un violoncelle, par un mouvement de va et vient continu, il fit tourner le bâton régulièrement et rapidement, le bout frottant le mélange inflammable dans la cavité de bois sec. Au bout de quelques minutes, un peu de fumée bleue sorti de l'alvéole chauffée par le frottement.
— Apporte vite un peu de foin et des brindilles bien sèches. Dès que tu verras du rouge dans la poussière de charbon, tu mets le foin dessus. Là, vas-y !
Sous le souffle léger de Valentin, de la fumée s'éleva puis une flamme timide surgit qui se propagea rapidement à la poignée d'herbes sèches. Il retira vivement son système et mit ses mains en conque autour du petit foyer.
— Pose quelques brindilles dessus maintenant. Oui, voilà. Pendant que je souffle, peux-tu récupérer des brindilles un peu plus grosses. Je crois que c'est gagné ! Il n'y a plus qu'à alimenter le feu. Tu prends une dernière photo ?
— Il était temps, je commençais à prendre froid dans mes habits mouillés.
— Moi pareil, répondit Valentin en ôtant sa chemisette. Continue à mettre du bois, j'installe un séchoir.
Il détacha la ficelle d'un côté de son arc et attacha l'extrémité libérée à un autre bâton. Il cala les extrémités libres des bâtons entre des grosses pierres et étendit son vêtement sur la ficelle tendue.
Le feu crépitait, colorant les deux amis de reflets orangés. Pauline sans un mot ôta son tee-shirt, libérant ses jeunes seins déjà formés et plaça son habit sur le séchoir improvisé. Valentin sentit une douce chaleur envahir le bas de son ventre. Pour la première fois de sa vie, une fille se déshabillait devant lui. Sans mot dire, gêné, il se leva, fit riper une grosse pierre plate vers le foyer.
— Ton siège, dit-il laconiquement pour ne pas laisser voir son trouble.
— Merci Valentin.
— Et le mien maintenant, fit-il en déplaçant une autre pierre près de la première. De longues minutes ils restèrent ainsi côte à côte, sans rien dire. Assis près de son amie à moitié nue, aux longs cheveux noirs encore un peu humides, aux yeux sombres et brillants reflétant les flammes dansantes, Valentin cherchait désespérément quelque chose à dire pour masquer l’émotion qui l'envahissait. Ce fut Pauline qui parla la première.
— On est comme les hommes des cavernes, tu ne crois pas ?
— Oui, c'est un peu ça, répondit-il d'une voix étranglée.
— Tu es enroué, tu as pris froid ? Tu as mal à la gorge ?
— Peut-être un peu.
— Je commence à me réchauffer. J'enlève mon short pour le faire sécher, ça ne te gêne pas ?
Valentin toussa pour faire semblant de s'éclaircir la voix.
— Non, pas du tout.
— Tu peux faire pareil si tu veux.
— Non, pas pour le moment.
— Tu as été super Valentin, déjà cet après-midi dans le car et encore ce soir, dit Pauline en passant son bras dans le dos du garçon.
— Hum, grogna-t-il simplement.
Il n'avait jamais su comment répondre à un compliment. À son tour Valentin mit son bras sur l'épaule de son amie. Le contact de la peau nue le fit frissonner. Pauline s'en rendit compte.
— Tu as encore froid ? Combien de temps crois-tu que nous allons devoir rester là ?
— Je vais voir dehors.
Valentin se leva, contourna l'étendage et observa les montagnes depuis l'entrée de la grotte.
— Le ciel s'éclaircit vers l'ouest, le vent s'est calmé et la pluie est devenue plus régulière. À mon avis dans une demi-heure, c'est bon.
Quand il revint, la vue de son amie presque nue relança son trouble. Il s'approcha d'elle, lui prit les mains et tira doucement pour lui demander de se lever. Quand elle fut debout, une lueur d'interrogation dans les yeux, Valentin se mit à genoux et posa deux rapides baisers sur la poitrine de l'adolescente. Pauline mit une main sous le menton de son ami et doucement lui releva la tête.
— Non Valentin ! Tu as été formidable aujourd'hui, ne gâchons pas tout. Elle posa furtivement ses lèvres sur la bouche de Valentin qui aussitôt se releva et se détourna.
— Tu as raison, je me comporte comme un imbécile.
— Tu te comportes comme un homme plutôt, mais pour moi vois-tu, c'est beaucoup trop tôt. Tu ne m'en veux pas ?
— Je ne t'en voudrai jamais Pauline.