Quand Eva et Valentin se furent un peu éloignés, ce dernier sortit son téléphone et appela Charly. Il activa le haut-parleur de façon à ce que Eva puisse entendre les réponses de la conversation.
— Charly, y a-t-il encore des copains chez toi ?
— Ils sont encore tous là, mais il est tard. Ils bouillent d’impatience d’avoir des nouvelles. Vous en avez ? Elles sont bonnes ?
— Écoute Charly, le mieux c’est que vous patientiez tous encore cinq minutes, nous arrivons.
Les amis de Valentin se levèrent tous en même temps quand il descendit de son VTT, tout essoufflé, suivit d’une Eva haletante sur l’antique bicyclette de sa mère.
— Alors ? Vous avez appris quelque chose ? Vous l’avez retrouvée ? Comment va-t-elle ? Où est-elle ?
— Attendez un peu, nous allons tout vous dire, mais avant, est-ce qu’il reste à boire pour Eva et moi.
Bouboule se précipita vers le seau à glace, en sortit un coca qu’il tendit à son amie et un jus de fruit qu’il décapsula et proposa à Valentin.
— Donc Eva avait vu juste au sujet de l’endroit où habite le monsieur que Pauline et Quentin avaient interrogé. Nous avons pu converser avec cet homme qui se nomme monsieur Dupré. Il nous a confirmé avoir vu Amandine dans le bois du parcours de santé et, nouveauté, il a remarqué qu’elle avait été bousculée par un autre jogger et qu’Amandine avait râlé.
Valentin porta à nouveau la bouteille à ses lèvres et but une longue rasade.
— Cela ne nous aide pas beaucoup, remarqua Charly.
À son tour Eva prit la parole.
— Attendez un peu. Monsieur Dupré nous a indiqué qu’un de ses amis pouvait éventuellement savoir quelque chose. Il nous a dit comment le trouver. On a pu discuter avec lui et l’interroger. Monsieur Lelong, c’est son nom, est adepte de la course à pied et, en passant dans ce bois, il a vu deux hommes en blouse blanche charger une personne sur un brancard. Il n’a pas vu le visage de cette personne mais il nous a indiqué qu’elle avait un bas de survêtement vert, comme… celui d’Amandine.
Le visage d’Eva se fripa sous l’effet de l’émotion et de l’inquiétude, ce que voyant, Valentin prit le relais.
— Nous avons questionné ce monsieur Lelong qui pensait qu’il s’agissait d’infirmiers secourant une personne blessée.
Mathilde, qui secouait négativement la tête, intervint.
— Ce n’est pas logique. Amandine se fait bousculer et aussitôt il y a là deux infirmiers pour la secourir. Il me semble qu’en cas d’accident, les secours mettent en moyenne dix minutes pour arriver sur les lieux.
— Oui Mathilde, ce que tu dis mérite réflexion mais attends la suite. Je lui ai demandé, à ce monsieur, s’il avait vu une ambulance pas loin et il a fini par se souvenir qu’une ambulance était stationnée dans le petit parking à l’entrée du camp scout.
— S’il y avait une ambulance dans les environs, c’est normal que l’intervention soit rapide, fit observer Florian.
— La question est : que faisait une ambulance à cet endroit ? réfléchit Gilles.
— Peut-être un ambulancier qui habite dans le coin et qui utilise ce parking pour garer son véhicule, tenta d’expliquer Quentin.
— Je passe souvent par là et je n’en ai jamais vu, objecta Gilles approuvé de la tête par Valentin qui enchaina :
— Le plus étrange, c’est que cette ambulance était un utilitaire Renault avec « Ambulance » en rouge sur les côtés mais avec une plaque minéralogique suisse !
— C’est comment une plaque suisse ? demanda Emily.
— Les plaques d’immatriculations suisses sont blanches avec à gauche le blason de la croix suisse, à la suite il y a les deux lettres du canton puis un nombre et à droite le blason du canton, expliqua Lucie.
— Tu en sais des choses, toi ! admira Olivier.
— Oui Lucie, reprit Valentin et monsieur Lelong justement a été intrigué par le blason cantonal qui représentait un ours de couleur noire dressé sur ses pattes arrière.
— De plus il a noté les lettres du canton, c’était AI, compléta Eva.
Gilles sortit son smartphone et tapota rapidement. Son visage prit une expression étonnée.
— AI est l’indicatif du canton d’Appenzell Rhodes Intérieures. Je ne connaissais pas. Je lis que c’est le deuxième plus petit canton du pays, il se situe au nord-est de la Suisse.
— Au nord-est donc en Suisse alémanique, constata Mathilde.
— C’est quoi ça ? questionna Margot.
— La Suisse où on parle allemand, expliqua Quentin.
— Ceux qui ont des smartphones, pouvez-vous chercher des images d’ambulances suisse-allemandes ?
— Pourquoi tu demandes ça, fit Margot intriguée.
— Quelque chose me semble étrange, répondit Valentin.
Après avoir tapoté sur son appareil, Bouboule s’exclama :
— Sur les ambulances de par-là, c’est écrit « Ret…tungs…dienst. » ânonna-t-il.
— Ou « Ambulanz » avec un Z à la fin, compléta Margot.
— J’ai demandé la traduction de Rettungsdienst et ça me dit « service de secours », compléta Bouboule. C’est ce que tu voulais savoir ?
— Oui Bouboule, merci. Rien ne vous semble bizarre ?
— Si, raisonna Mathilde, un véhicule de secours de la région suisse-allemande qui affiche le mot Ambulance en français, ce n’est pas logique. Est-ce tout ce que vous avez appris ?
— Oui pour l’instant. Maintenant, que faisons-nous ?
— Même si tout ceci est étrange, il faut quand même supposer qu’il s’agissait de vrais secouristes et tenter de se renseigner à l’hôpital, raisonna Mathilde.
— Comment peut-on faire ? Téléphoner ? dit Olivier.
— Attends un peu, je réfléchis, reprit Bouboule, demain c’est samedi. Suite à son accident de l’an dernier, Ma voisine Marion doit encore effectuer des contrôles à l’hôpital. Je vais demander à ses parents de les accompagner et là-bas je me renseignerai.
— Pour l’instant, la seule piste qu’on a, c’est cette bagnole. Ça va être duraille de la retrouver, émit Olivier.
— Chaque fois que quelqu’un verra une ambulance, il faudra qu’on la prenne une photo, dans Saint Thomas, à Ville-Semnoz, en ville aussi pour ceux qui peuvent y aller. Si on a la chance de tomber dessus, peut-être qu’on distinguera des visages à travers les vitres, dit Charly.
Pauline qui n’avait rien dit depuis l’arrivée de Valentin et d’Eva prit alors la parole.
— Tout ça ne nous dit pas ce qui est arrivé à notre amie. On ne tombe pas dans les pommes comme ça, sans raison.
— Le premier monsieur a dit qu’elle a été bousculée, fit remarquer Eva.
— Il a dit aussi qu’elle a râlé à ce moment-là, c’est donc qu’elle était consciente, et donc encore la présence des ambulanciers ne s’explique pas.
— Exact Pauline, conforta Gilles, Si je résume, Amadine court, se fait bousculer, râle un bon coup et très peu de temps après, les secours l’emmènent. Il manque un maillon à la chaine.
— Tu as raison Gilles, enchaina Pauline, il faut trouver pourquoi notre amie a été embarquée donc pourquoi elle est tombée dans les vapes, donc qu’est-ce qui a causé son évanouissement. Est-ce qu’on ne pourrait pas trouver d’autres témoins ?
— C’est déjà un miracle qu’on en ait dégotté deux, se désola Quentin.
— Ce n’est pas trop mon quartier mais quand nous sommes venus jusqu’ici par la petite route, nous avons longé le parcours gymnique de santé. De l’autre côté de la route, je crois qu’il y a un petit camping privé protégé par une haie assez haute. Je crois qu’il y a encore des campeurs, peut-être que quelqu’un a observé, vu ou entendu quelque chose.
— Très bonne remarque Lucie approuva Valentin, il faut continuer l’enquête par là.
— Il est bientôt sept heures du soir, il faut absolument que je rentre, dit Eva.
— Moi aussi, moi aussi, moi aussi, dirent presqu’ensemble Bouboule, Margot et Emily.
— Je vais m’en charger, proposa Valentin, est-ce que quelqu’un peut venir avec moi ?
— Je t’accompagne, fit Charly. Merci à tous, nous vous tiendrons au courant.