Toujours intrigué par le manège des occupants de la Clio grise, Valentin, dans sa tente, passa la première heure de la nuit à faire des recherches sur internet. Il finit par trouver un site expliquant la technique des voleurs modernes pour ouvrir un véhicule, un garage ou tout ce qui se télécommande, en interceptant puis en reproduisant le code électronique d’ouverture-fermeture à distance émis par la clé.
« Il s’agit d’un dispositif appelé Rolljam, un boitier électronique équipé d’une antenne radio qui intercepte et mémorise le signal expédié par le Plip de condamnation électrique des portes et du coffre. Il suffit alors aux malfaiteurs de reproduire le signal intercepté pour ouvrir la voiture et dérober la voiture ou ce qu’elle contient.
Concrètement, le Rolljam capture les codes secrets, appelés Rolling Code, qui sont générés à chaque fois qu’on appuie sur le bouton de verrouillage ou déverrouillage du véhicule. Ces codes expirent une fois qu’ils sont utilisés et sont aléatoirement renouvelés à chaque utilisation du bouton de déverrouillage. Situé à proximité de sa cible, le boîtier du voleur ne se contente pas d'intercepter le code envoyé par la télécommande : il sait aussi brouiller la transmission, de façon à ce que le signal n'atteigne pas le récepteur. Le code, stocké dans la mémoire de l'appareil, reste donc valable. De son côté, l'utilisateur vient d'actionner sa télécommande, sans résultat, pensant à un dysfonctionnement ponctuel, il va vraisemblablement recommencer. Ce second code sera lui aussi bloqué et capturé, puis le RollJam renvoie le premier code, toujours valide, vers le récepteur de la voiture.
Après deux pressions sur la télécommande, l'utilisateur a bien ouvert ou fermé sa porte, mais il a aussi fourni au RollJam un code valable, qui restera fonctionnel tant qu'une nouvelle commande ne sera pas envoyée. »

Valentin relut attentivement l’explication technique pour tenter de bien comprendre le processus.
« Voyons », pensa-t-il, « imaginons une voiture qui se gare sur le parking.
1. Les occupants descendent, le chauffeur appuie sur le bouton verrouillage de son Plip.
2. Le rolljam capture le code de verrouillage à l’aide de sa radio.
3. La radio brouille la transmission. Le verrouillage n’a pas lieu.
4. Le propriétaire de l’automobile n’entend pas le bruit caractéristique de la fermeture.
5. Il pense qu’il n’a pas appuyé assez fort, il re-appuie sur le bouton de la télécommande ce qui génère un nouveau code.
6. Ce nouveau code est aussi intercepté par le Rolljam qui alors renvoie le premier code et bloque les portières.
7. Mais le nouveau code intercepté qui n’a pas servi est parfaitement valable et donc est utilisable par le voleur.
C’est donc ça la technique moderne de vol de voiture…
Il me reste encore une vérification à faire pour être absolument certain que ceux de la Clio sont des pirates des parkings. »
Valentin amena sur l’écran de son smartphone l’image présentant un Rolljam, l’agrandit pour qu’elle occupe tout l’écran puis appuya simultanément sur le bouton principal et le bouton marche arrêt de son appareil. Le son de prise de photo lui indiqua que l’image avait été capturée.
« Demain, je demanderai à Inge si ce qu’elle a vu dans les mains du passager ressemblait bien à cette image. En fait, ces voleurs ne risquent pas grand-chose dans l’anonymat d’un grand parking de station balnéaire. Les gens sont persuadés d’avoir bien verrouillé leur voiture. Comme ils vont sur la plage, ils n’emportent pas leurs papiers, portefeuille voire leur smartphone qui craint le sable, ils laissent tout dans le vide poche ou le coffre à l’abri des regards. Beaucoup en s’en retournant ne vérifient même pas si leurs objets sont toujours en place et, arrivés chez eux, doivent chercher partout où ils ont pu les mettre. Il faut que je trouve un moyen de mettre fin à ce trafic malhonnête, mais comment? Bah, la nuit porte conseil, demain j’aviserai. »